Tanguy Marlin, una vida dedicada a la pesca
Découvrez l’interview de Tanguy Marlin, Product Manager / Chef de produit chez Sert / Sakura et figure emblématique de la pêche au leurre en France. Tanguy est en effet un grand compétiteur et participe depuis des années aux grandes révolutions que nous avons connues en France en matière de pêche au leurre. De Lucky Craft à Sakura en passant par ProTackle, Tanguy Marlin nous décrit son parcours.
Bonjour Tanguy, premièrement, pourrais-tu brièvement te présenter à nos lecteurs ?
Bonjour, je m’appelle Tanguy Marlin, j’ai 37 ans et je suis originaire de Paris. J’ai passé toute mon enfance là-bas, par la suite mes parents ont beaucoup déménagé et j’ai donc découvert les pays de Loire lors de mes études, puis la Gironde où je suis installé depuis une quinzaine d’années désormais.
D’où t’es venue cette passion pour la pêche ?
Comme beaucoup de personnes de ma génération, j’ai découvert la pêche au coup avec mes grands-parents, mes oncles et mon père qu’on a pratiqué assez jeune avec mon frère.
C’est devenu une passion plus prenante en grandissant où j’ai pratiqué un peu tous les types de techniques : carpe, feeder, coup, vifs, cuillers et leurres, etc… Vers mes 12 ans, je faisais beaucoup de kayak et passais donc beaucoup de temps au bord de l’eau, c’est à ce moment que la pêche aux leurres a pris le dessus et s’est révéler à moi.
J’habitais dans le 94 et pas loin d’un magasin de pêche qui s’appelait Wagner, à Saint-Maur-des-Fossés. Il organisait une école de pêche locale tous les mercredis. J’y filais avec assiduité à la fin de chaque entraînement de kayak. C’est là-bas que j’ai rencontré Hiroshi, qui a été un initiateur et à révél » ce déclic chez moi.
A cette époque, de nombreux acteurs étaient en train de préparer ce qui s’annonçait comme la révolution de la pêche aux leurres modernes tel que nous la connaissons aujourd’hui.
Thierry Cloux et Henri Limousin avait lancé le magazine « Fun Pêche », Michel Tarragnat pondait chaque mois un article sur une technique nouvelle de pêche aux leurres dans le magazine « La Pêche et les Poissons », Franck Rosmann et Laurent Poulain survolaient le classement du Challenge interdépartemental.
Bref c’était la démocratisation de la pêche sportive aux leurres et j’avais la chance de côtoyer ces acteurs ! C’est très certainement une des raisons qui fait mon addiction à la pêche.
Quelles sont les techniques de pêches que tu pratiques au bord de l’eau ?
Comme je te l’ai dit, depuis mon adolescence je ne fais plus que de la pêche aux leurres à 99%. Très occasionnellement je pêche un peu au feeder, au coup, ou au posé, mais c’est plutôt une excuse pour passer encore un peu plus de temps au bord de l’eau.
As-tu un poisson de prédilection ?
Il est très difficile de choisir un poisson en particulier, même si le black-bass a été révélateur dans mon apprentissage de la pêche et reste un de mes poissons de prédilection. Sinon je ne suis pas « bloqué » sur une espèce.
Au contraire, j’apprécie l’idée et l’expérience de capturer de nouvelles espèces aux leurres. C’est un aspect de la découverte qu’offre ce loisir et qu’il ne faut pas occulter.
Peux-tu nous raconter un peu ton parcours ?
J’ai eu la chance d’avoir des parents qui m’ont toujours soutenu et suivi dans cette passion. Ensuite la rencontre avec Hiroshi m’a permis de découvrir le baitcasting, les leurres modernes et de rencontrer un grand nombre de personnalités de la pêche.
A l’époque il me disait que temps que je ne serai pas capable de mettre un jig dans une coupelle à 10 mètres, je ne pourrai pas avancer dans cette technique. Que le « pitching » était la base indispensable pour apprendre le casting et tous les lancers.
Tant que je n’arriverai pas à aligner les pitching réussis, nous n’irions pas pêcher ensemble. Comme j’étais vraiment passionné et borné, j’y ai consacré de nombreuses heures, jusqu’à réussir.
A partir de ce moment-là nous allions pêcher ensemble, et Hiro était un peu mon « maître », je le suivais partout et passait une grande partie de mon temps libre, de mes weekends et vacances dans les bureaux de Yellow Bass à lui filer des coups de main pour profiter d’avoir à portée de main tous ses magazines, catalogues, vidéos et des montagnes de leurres !
De fil en aiguille, j’ai rencontré énormément de personnes dans le milieu professionnel de la pêche mais aussi dans le milieu associatif grâce à Black Bass France. J’ai commencé un BEP Aquaculture, et avant la fin de ce diplôme Hiroshi m’a proposé de m’embaucher chez Lucky Craft France.
À partir de là, j’ai travaillé pendant 7 ans pour Lucky Craft, participé à des salons, des portes ouvertes, ce qui m’a permis de vivre pour et de ma passion à 100%.
Ensuite, je me suis mis à mon compte pour une société italienne ProTackles, qui a créer Molix et je distribuais de célèbres marques nippones haut de gamme (Keitech, Evergreen, Imakatsu, MajorCraft, Toray et j’en passe) ! Cela a très bien fonctionné les premières années mais la suite a été plus compliqué et a eu raison de cette expérience.
Dans la continuité j’ai rejoint Sert et Franck Rosmann afin de développer la marque Sakura il y a maintenant 10 ans.
Voilà pour l’aspect professionnel. Sinon je participais également à pas mal de compétitions.
La 1ère a également été le 1er concours 100% Black Bass organisé sur le Vidourle à Marsillargues en 2000, où avec Lionel Grou nous avons eu la chance de gagner face à des icônes du bass de l’époque, nous étions fiers comme des coqs !
Ensuite, j’ai participé à d’autres compétitions en changeant régulièrement de partenaire : Philippe Bortin, Antoine Delaire, Laurent Poulain, Thierry Lecleach.
En 2005, nous avons commencé à faire équipe avec Guillaume Martino sur des compétitions internationales et nationales avec pas mal de succès, puis en 2008 ou 2009, j’ai fait équipe avec Jean Christophe David sur le circuit national (AFCPL, défi prédator etc).
Depuis je fais moins de compétition en France car le circuit de la FFPS me plaît moins, et que l’envie est moins là. Cependant depuis la création du France BASS Nation, nous participons régulièrement avec Yon Dupaquier à ces dates. Nous avons eu la chance de finir 2eme ex-aequo lors de la 1ère année, ce qui nous a permis de se qualifier BASS NATION aux Etats-Unis où j’ai pu représenter la France en 2018.
Une des seules compétitions internationales à laquelle je participe chaque année est l’Open de Lucio .
Sinon en 2003, j’ai fait mon premier voyage de pêche hors de nos frontières européennes. Nous sommes allés en Floride avec Ryusuke Hayashi où nous avons sillonné l’état à la découverte d’une multitude d’espèces marines et exotique sur du matériel bass. Il m’a fallu un moment avant de repartir.
C’est en 2010 que Francis Coutou, ancien PDG de cette société, qui lorsque les objectifs étaient atteints m’a invité à rejoindre l’équipe de la SERT pour une semaine de pêche à Madagascar. Là aussi ça a été une énorme révélation et j’ai complètement plongé dans une nouvelle dimension de la pêche. Une véritable bouffée d’oxygène dans ma passion pour la pêche !
Tu touches de près ou de loin à tout ce qui concerne le milieu de la pêche. On te voit designer, compétiteur, voyageur, chef de produits chez Sert/Sakura. Si l’on te demandait de décrire ce que représente la pêche pour toi, que répondrais-tu ?
La pêche représente tout ce que je viens de dire précédemment. Mais aussi un peu plus, c’est également de nombreux amis avec qui on partage cette passion commune ! La pêche s’est ma vie tout simplement…
Peux-tu nous en dire un peu plus sur tes fonctions chez Sert/Sakura ?
Je suis chef de produits chez Sert et spécifiquement pour Sakura, où nous travaillons en binôme avec Franck depuis 10 ans. C’est un plaisir de travailler ensemble, nous nous entendons bien et nous nous partageons les tâches. Lui c’est plutôt les cannes, et moi plutôt les leurres, pour les autres familles de produits tel que la bagagerie, les accessoires, etc, on se partage le boulot là encore.
C’est un métier pluridisciplinaire, qui implique une multitude de tâches, tel que de développer des produits, trouver des produits qui se vendent par rapport au marché actuel, répondre aux besoins des pêcheurs, de nos distributeurs, commerciaux et clients, réaliser les catalogues et des documents commerciaux, gérer les réseaux sociaux et les sites web, trouver de nouveaux clients, préparer les réunions commerciales, prévoir les achats, contrôler les chaînes de production, etc…
Il y a des aspects enthousiasmants et d’autres pas forcement drôles comme dans tous les métiers. Il faut être passionné pour bien faire ce travail.
On constate depuis quelques années une recrudescence du nombre de produits, matériels, fabricants, français ou étrangers. Comment Sert/Sakura arrive, selon toi, à se distinguer de cette concurrence de plus en plus présente ?
Et bien c’est grâce à notre savoir-faire ! Ça fait tellement longtemps que l’on pêche que l’on a une expertise poussée qui nous permet d’avoir une base solide dans le domaine du leurre et dans la canne à pêche. C’est un travail d’équipe dans lequel il faut pouvoir compter les uns sur les autres.
On est à l’écoute du marché. Nous écoutons nos commerciaux, nos distributeurs, nos collègues, nos pros staffs qui nous font remonter les infos en temps réel. On s’entoure d’une équipe fiable, efficace sur le terrain.
Un des points primordiaux chez Sakura est de rendre la pêche populaire et accessible à tout le monde. Nous essayons de faire au mieux pour sortir des produits avec un excellent rapport qualité/prix. Il faut qu’on gagne notre vie, que le détaillant aussi, mais que le prix de vente public soit raisonnable pour le consommateur puisse s’équiper convenablement sans que son budget vital soit impacté.
C’est bien là qu’est la difficulté de l’exercice. Faire des produits très beaux avec les meilleurs composants, c’est simple et ça rends les produits chers. A l’inverse faire des produits les moins chers possibles au détriment de composants de qualité et de conception c’est pas plus compliqué non plus.
Nous sommes donc entre ces 2 créneaux, et nous devons trouver un juste milieu qui inclut nos investissements sur la machinerie et les frais de moules.
Nous développons et concevons nos leurres nous-mêmes, dans certains cas nous avons mêmes acheté des machines pour réaliser certains procédé (type « Real Life » et autres) et c’est un coût à prendre en considération.
Mais cela nous permet d’avoir des leurres uniques, différentiant et propre à notre marque, c’est une de nos plus grandes forces !
Quelles sont les qualités principales pour être un bon communiquant dans ce milieu selon toi ?
Me concernant je ne sais pas si je suis un bon communiquant et je ne le pense pas. Contrairement à ce que l’on peut croire, je suis assez timide. Je n’aime pas me mettre en avant et je suis comme un lapin dans le feu d’un projecteur ^^
De manière générale, l’humilité ne fait pas de mal et lorsqu’on est pêcheur il faut savoir être modeste et respectueux. La pêche est un loisir, ce n’est pas de la politique, ni un sport de haut niveau, ni autre chose. On voit trop souvent des histoires d’ego revenir sur le devant de la scène de ce loisir, je trouve ça malsain.
La pêche est une passion qui ne vaut le coup d’être vécu que si elle partagée.
Quelles sont les nouveautés Sakura que tu pourrais nous présenter ? Quels sont vos objectifs cette année ?
Il y a énormément de produits à la gamme et beaucoup ont des places de titulaires dans mes box. Pour cette année les principales nouveautés qui me viennent sont :
Le Gemibug pour pêcher le chevesne. C’est une pêche jeune simple, fun et ludique. Le Gemobug est une sorte de » popper bug » qui est plus dans la réaction que l’imitation qui est le cas de son frère aîné : le Notobug.
Le Cajun spinnerbait et chatterbait en 21gr qui est sorti cette année est une véritable boucherie ! ça se lance comme un missile grâce à une tête extrêmement compacte, ça permet de couvrir beaucoup de terrain rapidement.
Le leurre est hyper efficace. Il évolue dans la moyenne de 1 à 3m de profondeur ce qui est selon moi les profondeurs les plus intéressantes pour ce type d’action que ce soit en float, en boat ou du bord. Ce sont des armes ultimes, avec un rapport qualité/prix autour des 10 euros avec une construction irréprochable et un niveau de finition digne des meilleurs produits nippons.
Le R Jig en 21gr, qui est vraiment techniquement adapté pour la pêche du brochet en eau profonde : entre 5 et 12 mètres. C’est assez subtile comme technique et très amusant, les touches sont géniales avec un taux de décrochés extrêmement faible.
L’animation doit être minimale et on a un contrôle et un contact permanent avec le leurre. Bref, moi je suis devenu fan et c’est mon leurre idéal pour les pêches de brochets en pélagique et en lacs de Juin à Décembre. Vous en verrez un peu plus sur l’article du mois de Mai du magazine « La Pêche et les Poissons ».
En ce qui concerne les objectifs cette année, c’est de continuer sur notre lancer ! De nous faire plaisir à concevoir du matériel qui vous offre des émotions, vous faire rêver et vous permettre de vous équiper avec le meilleur matos possible au meilleur prix.
Tu es très actif dans le milieu associatif, et dans la protection des milieux aquatiques en France. Quel est ton regard sur la gestion de la pêche dans notre pays ? Y vois-tu des améliorations depuis ces dernières années ?
Je fais effectivement partie du bureau de Black-Bass France. Mais entre le boulot, la famille, la pêche, les compétitions, les voyages, je ne suis pas autant actif que je le souhaiterai. J’espère simplement être un bon ambassadeur pour représenter l’importance de cette association.
En 2019, j’ai répondu présent pour une animation organisée par une fédération de pêche française dynamique qui mérite d’être vraiment connu ! Ils sont hyper solidaires, bienveillants, dynamiques, à l’écoute des pêcheurs ! Ils se bougent vraiment pour faire avancer les choses : Il s’agit de la fédération de l’Aveyron.
En ce qui concerne l’évolution des milieux aquatiques français, il suffit de regarder le dernier Fishing Club avec le président de la Fédération : Mr Roustand pour comprendre que quelque chose ne va pas… Je ne sais même pas quoi répondre à ça. Le meilleur côtois le pire dans les AAPPMA et les fédérations françaises !
Ce que je vois surtout depuis toutes ces dernières années, c’est que « le privé » est en train de s’immiscer dans la gestion de la pêche en France. L’exemple parfait c’est le France BASS Nation qui arrive avec une compétition et une charte simple à mettre l’argent des compétiteurs et des sponsors au service de nos milieux.
Un grand merci à David Dubreuil, Jean Christophe David, Etienne Fleurant et tous les bénévoles pour ça !
C’est également le cas pour le collectif «Don’t drop the Bass» qui opère en vendant les œuvres de Matthias Lotthy, Christophe Hugues, et Daniel Mestrot, dont les revenus sont remis à l’eau en black-bass en mode 1 euros = 1 euros de bass !
Bravo à eux qui par leurs actions arrivent à rassembler et fédérer les AAPPMA, la fédération et des centaines, voire des milliers de pêcheurs autour d’un poisson et d’une passion commune.
Mais encore une fois c’est le tissu associatif qui améliore notre droit commun, tandis que d’autres restent inactifs alors qu’ils ont les moyens et les attributions pour le faire.
Des projets futurs dont tu voudrais nous parler ?
Ben, je viens de revenir du Brésil en Décembre déjà. Le voyage s’est tellement bien passé, que du coup on y retourne en Décembre 2020, encore une fois pour la pêche des peacock bass. C’est un poisson fabuleux qui fait qu’on traverse la planète pour lui !
Je sais que vous savez de quoi je parle chez Rodmaps car vous êtes habitués à ce genre de fishing trip ! 😉
Ensuite au moment où je te parle, je suis en route pour l’Extremadure afin d’essayer d’attraper un Black-bass de 3kg.
Pour les compétitions, peut être le BASS France Nation et l’Open de Lucio en Novembre, mais tout va dépendre de nos disponibilités.
Pour le travail, nous avons pour objectif de réduire la quantité de carton et de plastiques présents dans nos commandes et dans nos packagings. C’est un problème majeur dont nous devrions tous nous soucier, car il est relativement simple de trouver des solutions pour ça et contribuer à un effort commun en la matière.
La suite est de continuer à travailler sur des produits plus écologiques et responsables dans les leurres souples.Ainsi que de développer des matières biodégradables, mais pour cela il nous faudra encore du temps que nous n’avons pas malheureusement.
Une anecdote de pêche à nous raconter ?
La dernière en date, ou du moins l’une de notre dernière session de pêche en Extremadure (d’où je suis rentré et je n’ai pas fait mon bass de 3kg L) :
Nous étions 3 sur le boat, avec Yon, Bastien, et moi-même.
La journée ne s’annonçait pas mauvaise même si le vent était largement de la partie… L’après-midi sur une pointe, Bastien nous sort 3 poissons en 3 lancers… le 1er fait 1,9kg, puis second lancer et second poisson de 2,3kg ! 3ème lancer et BIM 3ème bass… 2,2kg… Petite précision quand même ! Le lancer s’effectue exactement au même endroit ! Soit 6,4kg en 3 poissons et 3 lancers !
Entre la joie et le choc de ce moment incroyable ! Bastien pose sa canne et décide d’arrêter là !
Nous étions ancré et continuons à pêcher la zone pendant 5 minutes, y compris en lançant dans la fameuse « Strike Zone »… mais rien ne se passe.
Je décide donc de prendre la canne de Bastien, et de lancer dans LE spot… ben quelque tour de manivelles plus tard, c’est pendu ! Dans la joie et la consternation ! ^^ verdict 2,850kg !
Des anecdotes il y en a et il y en aura plein. Nous en avons vécu plein toi et moi Nico quand nous étions sur l’île de Socotra et à Madagascar ! 😉